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6 octobre 1994 ![]() |
Prot�ines architecturales r�volutionnaires
Des chercheurs de l'Universit� Laval et de l'Universit� de Calgary jettent un nouveau pav� dans la mare - de moins en moins tranquille - de la recherche sur la croissance cellulaire.
Dans l'�dition du 20 mai du prestigieux journal Science, les chercheurs Beno�t Leblanc et Tom Moss du Centre de recherche en canc�rologie de l'Universit� Laval � l'H�tel-Dieu de Qu�bec (Facult� de m�decine) et leurs coll�gues de Calgary, David P. Bazett-Jones et Manfred Herfort, d�crivent la fonction d'une prot�ine, appel�e UBF, qui intervient de fa�on non conforme au mod�le classique dans la transcription de l'ADN. La transcription est le m�canisme par lequel les informations h�r�ditaires d'un �tre vivant, cod�es dans des mol�cule d'ADN, sont traduites en mol�cules d'ARN.
Le mod�le qui a cours pr�sentement veut que la transcription soit amorc�e par des prot�ines dont une partie reconna�t et se lie � des s�quences sp�cifiques d'ADN alors que l'autre partie, appel�e r�gion d'activation, intervient en facilitant le travail du complexe enzymatique responsable de la transcription. Priv� de leur r�gion d'activation, ces prot�ines sont incapables d'enclencher le processus de transcription. Au cours des derni�res ann�es cependant, des chercheurs ont d�crit quelques prot�ines au comportement singulier qui se lient � l'ADN et en stimulent la transcription sans pour autant poss�der de r�gion d'activation. De plus en plus d'indications portent � croire que ces prot�ines agissent en modifiant l'architecture spatiale de l'ADN.
Les prot�ines UBF �tudi�es par le quatuor Qu�bec-Calgary constituent un nouveau cas de non-conformit� au mod�le classique. Ces prot�ines, qui se retrouvent habituellement par paire dans la cellule, se lient, en six � dix points r�guli�rement espac�s, au brin d'ADN de fa�on telle qu'elles le plient dans l'espace, formant une spirale continue dont chaque boucle, visible en microscopie �lectronique, a une longueur sp�cifique d'environ 180 paires de bases. Ce pliage de l'ADN lui donne une configuration spatiale qui permet � un complexe de prot�ines de se lier � son tour � l'ADN et d'enclencher le processus de transcription de l'ADN. Sans le pliage pr�alable de l'ADN par la prot�ine UBF, le complexe de prot�ines serait incapable de reconna�tre l'endroit o� il doit s'attacher.
L'�tude r�alis�e par les quatre chercheurs porte sur une partie de l'ADN contenant l'information g�n�tique n�cessaire � la fabrication de l'ARN ribosomal, une composante importante des ribosomes (les ribosomes font office d'usines d'assemblage des prot�ines dans la cellule). L'activit� de la prot�ine UBF change en fonction des besoins de la cellule en ARN ribosomal. Lorsque la cellule se pr�pare � se diviser, elle doit d'abord accro�tre sa taille ce qui suppose une synth�se prot�ique intense, une activation des g�nes d'ARN ribosomal et donc un r�le actif de la prot�ine UBF. �L'activit� de la prot�ine UBF semble �tre r�gl�e par la m�me cascade de r�actions que celle impliqu�e dans la division cellulaire, dit Tom Moss. La modulation de l'activit� d'UBF pourrait donc servir de moyen de contr�le cl� pour la multiplication des cellules.�
Les cons�quences de cette d�couverte? �Difficile de juger de l'importance de cette d�couverte pour l'instant, r�pond Tom Moss, mais �a peut �ventuellement nous conduire � une meilleure compr�hension des m�canismes de la croissance cellulaire et des d�r�glements de ces m�canismes qu'on observe dans les cancers. Dans l'imm�diat, si notre mod�le est exact, �a va surtout changer la fa�on dont les chercheurs voient le processus de la transcription, �a risque de les pousser � chercher de nouvelles explications aux ph�nom�nes qu'on observe et � remettre en question des paradigmes plut�t que de se contenter de les accepter comme des v�rit�s absolues.�
JEAN HAMANN
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