27 octobre 1994 |
Louise Lalonger: du fil � retordre
Saviez-vous qu'une m�me couleur peut provenir de deux colorants? Et qu'un colorant, qu'il soit naturel ou synth�tique, ne s'identifie pas � l'oeil nu? Ces questions qui peuvent para�tre bien futiles, voire un brin inutiles pour le commun des mortels, passionnent toutefois Louise Lalonger. Dans le m�moire de ma�trise qu'elle effectue sous la direction de Jocelyne Mathieu, du D�partement d'histoire, et la codirection de Robert H. Burnell, du D�partement de chimie, la chercheuse �tudie la fa�on dont s'est fait le passage des colorants naturels aux colorants synth�tiques sur une production de tissage domestique au 19e si�cle, au Qu�bec.
C'est un chercheur anglais, du nom de William Perkin, � qui on doit la officiellement la d�couverte du premier colorant synth�tique, la mauv�ine, en 1856. �En plus de modifier et d'�largir la gamme des couleurs, cette d�couverte va �galement modifier les m�thodes de travail et d'acquisition, indique Louise Lalonger. La cueillette des plantes servant � produire le colorant va �tre remplac�e par la fabrication d'une poudre en manufacture que les gens pourront acheter sur place.�
L'originalit� de cette recherche tient au fait qu'elle comporte deux volets, l'un ax� sur la recherche m�thodologique bas�e sur l'enqu�te et sur la documentation (informateurs, sources �crites), et l'autre bas� sur l'analyse scientifique des colorants sur une collection de textiles. �En 1988 et en 1989, j'ai effectu� deux stages au Smithsonian Institute de Washington, l'un sur les colorants naturels et l'autre sur les colorants synth�tiques, qui m'ont convaincue que l'analyse constitue un outil indispensable dans l'�tude de la couleur."
C'est ainsi qu'apr�s avoir proc�d� � des tests d'extraction chimique avec solvants et de chromatographie en couches minces sur une quarantaine d'�chantillons de son corpus dans les laboratoires du D�partement de chimie de l'Universit�, Louise Lalonger a compar� ses r�sultats � ceux de l'historien Marius Barbeau, entre autres chercheurs. Elle y a non seulement relev� des erreurs d'interpr�tation (colorants naturels vs colorants synth�tiques) mais aussi des erreurs de datation. � son avis, ces erreurs s'expliquent par le fait que dans les ann�es 1940-1950, les chercheurs n'avaient pas acc�s aux techniques scientifiques permettant de d�tecter la nature d'un colorant.
Restauratrice de textiles au Centre de conservation du Qu�bec depuis 1981, Louise Lalonger affirme que l'une des applications pratiques de sa recherche consiste en la possibilit� d'identifier les colorants les plus sensibles � la lumi�re, qu'ils soient naturels ou synth�tiques. � cet �gard, les mus�es qui exposent des collections de v�tements, par exemple, seraient les premiers b�n�ficiaires de cette �tude originale. �Si on sait qu'un colorant est particuli�rement sensible � la lumi�re, on va limiter l'�clairage en p�riode d'exposition. En fait, beaucoup de choses se font dans le domaine de la conservation des peintures mais � peu pr�s rien dans celui du textile.�
REN�E LAROCHELLE
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