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24 novembre 1994 ![]() |
Id�es
LA M�LODIE DU BONHEUR
PAR CLAUDE COSSETTE *
PROFESSEUR TITULAIRE ET DIRECTEUR DU PROGRAMME DE COMMUNICATION GRAPHIQUE � L'�COLE DES ARTS VISUELS
(*) Extraits de la Conf�rence de cl�ture du premier cycle des Grandes conf�rences de la formation continue Les rendez-vous Universit� Laval / LeSoleil, prononc�e le 22 novembre 1994, au pavillon La Laurentienne.
�Qualit� de la vie.� Y a-t-il expression plus contradictoire que celle- l�? Bien s�r, notre vie a gagn� en qualit� sous certains aspects: moins de citoyens travaillent plus de 70 heures par semaine pour un salaire de cr�ve-faim comme le font nos esclaves des r�publiques de bananes d'Am�rique centrale, ou ces fourmis disciplin�es riv�es aux cha�nes de montage �lectronique de tous ces pays d'Asie communistes ou capitalistes.
Moins de b�b�s meurent nouveaux n�s, moins d'adultes sont atteints de tuberculose, moins de pirates attaquent les voyageurs, etc. Du moins, chez nous.
Mais alors, comment se fait-il que le Canada se trouve confront� � des calamit�s aussi �tendues que les faillites personnelles, le sang contamin�, le ch�mage chez les jeunes, ou les burnouts? Eh bien! regardons les choses en face: c'est que la morale pr�dominante des gens de la g�n�ration en place est la morale �conomique; le seul signe qui compte pour eux, c'est le signe de piastre; le seul Dieu qu'ils adorent, c'est le Dieu de l'argent.
Mais ce dieu Argent est un dieu vengeur. M�me au risque d'empoisonner leurs malades, les responsables des banques de sang --en France, disons-- estiment qu'il en co�terait trop cher de jouer la carte de la prudence;
les entrepreneurs ambitieux "purjutent le citron" de leurs cadres jusqu'au burnout et les jettent ensuite comme une vieille guenille (le monde de la publicit� lui-m�me est particuli�rement expert � cet art).
Les sacrifices au dieu Argent
Soyons r�alistes et admettons que la performance � tout prix frappe d'infarctus les cadres �l�gants d'aujourd'hui aussi s�rement que le charbon tuait les mineurs du Germinal de Zola. Quand le succ�s financier est le crit�re le plus important pour la "qualit� de vie", bien des apprentis sorciers sont pr�ts � se tuer � l'ouvrage, � �craser les autres � mort pour... des v�tements Hugo Boss, une berline allemande, un cottage d�cor�-paysag� dans le Bois� de St-Machin, les vacances au Club Med.
Mais pour obtenir tout �a, il faut sacrifier quelque chose: la souplesse des horaires (l'agenda limite la disponibilit� aux relations humaines), les moments de vrai cong� (on travaille aussi sur le golf... quand ce n'est pas � Cancun), la vie familiale (l'obligatoire ubiquit� g�ographique gruge le temps familial), ainsi de suite.
Et puis, si des enfants ne voient plus leur p�re, ��c'est pour eux�� s'exclame le p�re esclave de l'activisme. Faut bien deux revenus pour leur payer le SuperNit et les cassettes � 100$ (���a d�veloppe leur rapidit� d'esprit, leur capacit� de raisonner... � argumente-t-on), les camps d'�t� (puisqu'on n'est pas l� pour s'en occuper), les �coles priv�es (qui encadrent tellement bien --ce que les parents d'aujourd'hui sont difficilement capables de faire).
Dans notre soci�t� de l'argent, soumis aux pressions de la publicit�, m�me des adultes pas si na�fs s'imaginent que les objets peuvent remplacer l'amour. Si bien qu'aujourd'hui, le cadeau le plus rare qu'on puisse recevoir, c'est du temps, du temps consenti par des parents, des amis, des professionnels, des inconnus.
Et �a, les jeunes commencent � le ressentir; et ils ne sont pas d'accord avec cette fa�on de voir. Ils ne veulent pas tomber dans le m�me pi�ge que leurs parents. Ils r�sistent --sur le plan individuel et de mani�re tacite, mais ils r�sistent. C'est �a que les nouveaux entrepreneurs ressentent: ��Il est de plus en plus difficile de trouver des jeunes "qui acceptent de travailler"� pr�tendent-ils. Ce n'est pas que les jeunes ne veulent plus travailler, c'est qu'ils n'acceptent plus de devenir esclave pour un salaire. Ils ont compris que, dans la jungle de l'excellence �conomique, ils ont plus de chances de devenir excellent dans d'autres domaines moins tuants: d�couvrir le plaisir de jouer de finesse � Dongeons & Dragons, mettre ses espoirs dans le d�veloppement d'une famille, respecter son corps en misant sur les aliments biologiques, soigner son �me en cheminant dans la spiritualit� exotique.
Mais si un certain nombre de jeunes r�sistent, un plus grand nombre encore seront abus�s pendant 10, 20 ou 30 ans avant de se r�veiller... alors seulement qu'ils ne sont plus jeunes du tout: sans s'en rendre m�me compte, ils gobent sans esprit critique ce que la soci�t� leur propose comme mod�les, en particulier par les massm�dias.
Le r�le n�faste des m�dias
Aucune soci�t� n'�chappe � l'envahissement tentaculaire des massm�dias, de la simple radio de brousse ou radio pirate, � l'autoroute �lectronique r�serv�e aux riches de la technologie. Les massm�dias peuvent servir � rassembler m�me par del� les fronti�res les individus isol�s: qu'on se rappelle le r�seau de solidarit� internationale qu'a permis la radio amateur. Les massm�dias peuvent aussi servir � isoler les individus: nous subissons tous, ces mois-cis, la pression de "l'�conomie qui veut �conomiser" en branchant les citoyens � l'autoroute �lectronique, qui seront d�sormais isol�s devant leur �cran parce qu'ils travaillent chez eux, font leurs achats � distance, ne parlent plus m�me � leurs "amis" que par e-mail. Tous les moyens de la communication de masse --publicit�, relations publiques, presse-- sont mis en oeuvre pour que chaque citoyen exige son num�ro de code mondial de l'Internet.
Bien s�r, les massm�dias sont un rouage important de l'�conomie. Ce sont eux qui affichent la vie sociale des riches et puissants, ce sont eux qui diffusent les messages persuasifs dont l'�conomie a besoin pour tourner, ce sont eux qui soulignent le r�le social si utile jou� par les entreprises. Ce sont --de temps � autre!-- eux qui r�v�lent les collusions entre les politiciens et le monde de l'argent.
Les massm�dias sont financ�s principalement par les revenus publicitaires. M�me les r�seaux d'�tat (Radio-Canada ou Radio-Qu�bec) ne peuvent survivre sans les revenus g�n�r�s par la publicit� ou autres commandites. Or le r�le de la publicit�, c'est de r�p�ter sans cesse et sur tous les tons que "c'est en consommant qu'on est heureux". Tous les messages publicitaires sont construits pour faire r�ver... au bonheur, au bonheur consommatoire. Dans ce processus tel qu'il fonctionne, c'est ultimement l'�conomie qui profite de nos r�ves de bonheur.
Il n'y a pas si longtemps encore, l'�conomie se contentait de fournir des produits, des objets, � la consommation de masse. Aujourd'hui, l'�conomie fait fl�che de tout bois et --pour garantir des marges de profit toujours plus larges exig�es par les investisseurs et les capitaines des grosses multinationales-- mise surtout sur les services, des loisirs � la religion. Jean-Pierre Moisan, un sp�cialiste de Price-Waterhouse pr�cise:
��[Les commer�ants] veulent satisfaire des besoins qui ne sont pas que primaires, mais aussi tertiaires et m�me psychologiques.� (rapport� par Claude Turcotte dans LeDevoir du 9 octobre 1994)
Effectivement, qu'est ce que susurrent les massm�dias aux oreilles de notre jeunesse? Que le sexe, l'argent, la puissance et la gloire sont les seuls moyens de parvenir au bonheur. Toute personne de 50 ans sait bien que ce n'est l� que mensonges. � coups de millions pour empocher des millions, les grandes entreprises ex�cutent � coeur d'ann�e pour notre jeunesse des lavages de cerveaux aussi machiav�liques que les plus terribles internements psychiatriques du P�re Staline. ( ... )
La fuite dans le �virtuel�
Pire encore, parce que le monde r�el est trop dur, d'autres parmi les plus fragiles, s'esquivent et s'enferment dans "le monde virtuel". On pense que le monde virtuel est � venir mais il est d�j� l�. Il est de plus en plus pr�sent � mesure que les massm�dias sont devenus de plus en plus puissants, en particulier depuis que les t�l�viseurs sont plus nombreux que les enfants dans les foyers ( ... ) Bien s�r, la r�alit� "virtuelle" est attirante pour les jeunes car elle est facile � ma�triser: c'est moins compliqu� d'obtenir ses orgasmes en feuilletant un Playboy ou en visionnant une vid�ocassette Penthouse Pet of the Month III que d'investir temps, �nergie et complicit� pour les labyrinthiques approches d'un partenaire de la vie r�elle. D'autant plus que dans un monde fou fou fou propre propre propre comme le n�tre, � s'engager dans une approche h�t�rosexuelle traditionnelle, on risque d'�tre accus� de harc�lement sexuel. Et, de toute mani�re, cela demande moins d'�nergie et de courage de d�livrer la Princesse de Super Mario Bros que de partir faire La Course autour du monde de Radio-Canada.
Ce n'est pas que les jeunes rechignent � la fatigue ou au risque. C'est nous qui les tenons dans la ouate et qui n'osons plus leur proposer des d�fis stimulants; on les a habitu�s � tout obtenir facilement: l'argent, les bonnes notes et l'estime de soi. (Mais comme le disait Le Cid de Corneille: ��� vaincre sans p�ril on triomphe sans gloire.�)
Effectivement, les jeunes ont fini par comprendre que, dans cette soci�t� -l�, le virtuel est plus gratifiant que le r�el. Prenons par exemple l'apprentissage du piano: jouer pour vrai prend trois ans --pour pouvoir pianoter un peu-- alors que le Rapman de Casio � 150$ nous donne d�j� sans temps ni effort l'impression d'�tre un artiste. Si bien que chaque jeune a l'impression qu'il sera encore meilleur si le clavier qu'il ach�te co�te 1500$ au lieu de 150$ --m�me s'il ne conna�t rien au solf�ge. Avoir un clavier donne d�sormais plus de satisfaction qu'�tre musicien.
L'�conomique �touffe la cr�ativit�
Malgr� tous les F�lix et Galas de l'Adisq, quel jeune peut avoir une vision artistique personnelle quand tout est nivel� par le laminoir de l'ordre �conomique. Certains papes du pop pr�tendent que les jeunes d'aujourd'hui sont plus m�rs que ceux d'autrefois et qu'ils savent se d�fendre face � la publicit�. Jo�l-Yves Le Bigot, responsable de l'International Education and Development (?) et de l'Institut de l'enfant de Paris, se r�jouit du mode de vie des jeunes (dans La Pub, �ditions Autrement): ��Regardez comment ils se sont branch�s sur les radios libres [c'est-�-dire priv�es]; songez qu'ils passent autant de temps avec leur poste de t�l� qu'avec leur p�re ou leur prof. Ils sont �veill�s de fa�on pr�coce � des questions complexes, bien mieux pr�par�s que leurs parents � la civilisation m�diatique de demain.� Amen!
En r�alit�, sous des habits scientifiques, Le Bigot est un chercheur pay� par les dollars publicitaires; il cherche chez les jeunes les failles motivationnelles qui permettront aux marketers de leur vendre toujours davantage...�en leur promettant le Bonheur publicitaire. Pourtant, toute personne mature --qui n'est pas en conflit d'int�r�t et qui a particip� � l'�ducation d'enfants-- sait bien que ce n'est pas parce que le vocabulaire est plus �tendu ou que les connaissances encyclop�diques sont plus vastes qu'une jeune intelligence peut faire de l'interpr�tation, des d�ductions, des extrapolations, de la critique ou d�couvrir les principes d'organisation de r�alit�s complexes. Je dirais m�me que les jeunes sont flou�s par les massm�dias qui, � coup de quiz b�b�tes, leur laissent croire qu'ils sont intelligents. Et parfois, �a va jusqu'au d�tournement de valeurs nobles.
Qu'on pense � une campagne comme celle de l'italien Luciano Benetton. Avec les photos choc de Oliviero Toscani et son slogan � United Colors of Benetton��, cette entreprise de v�tements a r�ussi � occuper les cerveaux des jeunes 15-30 ans. Au d�part, les strat�ges Benetton avan�aient une id�e qui paraissait g�n�reuse: ��Il ne doit pas y avoir de discrimination raciale... c'est ce que nous pensons chez Benetton�� semblait dire la publicit�. Avec des images gentilles qui mettaient en sc�ne des jeunes de toutes races, Benetton semblait vanter la fraternit� universelle. Mais ce que Benetton faisait en r�alit�, c'�tait ancrer dans les jeunes esprits l'id�e que les jeunes ouverts au monde portent des v�tements Benetton.
Puis, sans agence de publicit� et sous la gouverne du photographe Toscani, Benetton s'est amen� avec une nouvelle strat�gie plus machiav�lique encore: on s'est mis � enfoncer des tabous...�sachant bien que ce faisant, on d�cuplait le rendement publicitaire puisqu'on obtenait de l'espace �ditorial gratuit dans lequel on discutait le pour et le contre de ces nouvelles campagnes. R�sultat: un mourant sidatique entour� de sa famille, un militaire sauvage tenant le f�mur de son ennemi, les boat-people risquant leur vie pour survivre, le corps sanglant d'une victime de la guerre civile... servent d�sormais � augmenter la notori�t� de la marque Benetton, � vendre des v�tements portant cette griffe, donc finalement, � remplir les coffres de Luciano Benetton. Et ce sont les jeunes qui sont les dindons de la farce puisque ce sont eux qui payent le prix fort quand ils d�sirent se parer d'une marque qui jouit d�sormais d'une notori�t� forte. Voil� donc un exemple pr�cis qui montre comment le Bonheur publicitaire corrompt la jeunesse ( ... )Voltaire se trompait: ce n'est pas la religion qui est l'opium du peuple, qui g�le les esprits; ce sont les biens vant�s par la publicit�. C'est l'argent du d�veloppement de l'intelligence, du partage international, du temps de m�ditation qui est ainsi gaspill� en a�roports plus luxueux, en super autoroutes, en buildings herm�tiquement climatis�s, en gadgets �lectronico-militaires plus sophistiqu�s.
Comment se fait-il que le citoyen ordinaire se laisse ainsi voler son argent donc son temps --et peut-�tre m�me son �me--�par les �lites en place? Par un effet de cons�quence de la complicit� naturelle entre les massm�dias et l'�lite bourgeoise. Les massm�dias ouvrent large leurs portes aux gens en place qui profitent gratuitement des antennes pour r�pandre leurs valeurs de puissants, de riches, de beaux, de c�l�bres. Au besoin, on met au point une s�rie Riches et c�l�bres pour faire saliver les petites gens. Sur quoi? Sur le faux bonheur que semblent procurer les objets. Les riches s'offrent eux-m�mes en mod�le aux pauvres... qui s'endettent � vouloir les imiter. Et � qui le citoyen endett� doit-il cet argent? � ceux qui se pr�sentent comme mod�les dans les massm�dias, ceux qui poss�dent d�j� l'argent. Scandaleux!
Le Bonheur vant� par les chantres de l'�conomie, les publicitaires, se fonde sur le gaspillage. Un thurif�raire de la publicit� comme le fran�ais Jacques S�gu�la qui est tout de m�me le pr�sident de la 1re agence fran�aise --ou de la 2e, selon les ann�es--admet cela dans l'enthousiasme: ��Nous ne pouvons nous d�velopper qu'en soci�t� de surconsommation. Ce surplus est le n�cessaire du syst�me. [...] Ce syst�me fragile perdure seulement par le culte de l'envie.� (dans L'argent n'a pas d'id�es, seules les id�es font de l'argent, �ditions Ho�beke)
S�gu�la est heureux: l'activit� familiale pr�f�r�e est d�sormais d'arpenter hebdomadairement les centres d'achat. Le psychanalyste Erich Fromm r�sume cette situation dans une formule dans laquelle beaucoup de promeneurs du dimanche se retrouvent: ��L'homme moderne trouve son bonheur dans la fi�vre du l�che-vitrine, et dans le fait d'acheter tout ce qu'il peut acheter, que ce soit comptant ou � cr�dit.��(dans L'Art d'aimer) Le centre d'achat est devenu le forum ou l'agora de l'an 2000. Sauf qu'on ne va plus l� pour d�fendre la d�mocratie mais pour faire tourner l'�conomie (... )
La pub envahissante
La publicit� est d�sormais omnipr�sente. Elle se d�guise en infomercial, en publireportage, en n'importe quoi. Mais qui s'en plaint? Les recherches le d�montrent � r�p�tition, le peuple aime cela. Je pense personnellement que la publicit� constitue pr�sentement le v�hicule culturel le plus puissant dans nos soci�t�s capitalistes. Je risquerais:
plus encore que la musique ou la chanson. Pourtant, quel massm�dia dispose d'une chronique r�guli�re pour �valuer les annonces publicitaires les plus remarqu�es, les soupeser, les critiquer? (Le Devoir publie Patrick Pierra dans son cahier �conomique le samedi.) Les articles sur la publicit� sont g�n�ralement �crits par des publicitaires ou par des personnes qui en vivent, ces papiers ne sont que des encensoirs d�guis�s. Ils sont souvent bien �crits et bien document�s, mais peu critiques. Comme le faisait remarquent Tilliette et Barth�l�my (dans La Pub, �ditions Autrement): ��Cette pub qui n'a de cesse de nous provoquer � travers tous les m�dias reste encore un des sujets tabous de la grande presse. de peur que les annonceurs d�sertent ses colonnes. d'o� le paradoxe: plus la publicit� fait de bruit, plus elle impose le silence sur son fonctionnement r�el.�
L'�tat lui-m�me est devenu le plus gros annonceur au Qu�bec, de m�me que l'�tat f�d�ral au Canada. La publicit� de l'�tat est-elle plus morale parce qu'on peut la qualifier de "soci�tale" comme le fait mon coll�gue Jacques De Guise du d�partement de Communication-information? Au contraire, la publicit� soci�tale s'attaque plus directement encore � nos mani�res de penser. La publicit� de biens pervertit les �mes par effet d�riv�, alors que c'est dans son objectif premier que la publicit� soci�tale vise � influencer nos mani�res profondes de penser, nos attitudes et nos comportements. Au moins, sous le gouvernement Nazi, Josef Goebbels �tait clairement nomm� "ministre de la propagande". Je ne dis pas qu'il ne faut pas faire appel � la publicit� pour promouvoir des causes hautement morales; je dis simplement que cette publicit� est, clairement dit, de la propagande, et qu'il faut regarder cela avec un oeil critique d'aussi pr�s qu'on le fait, disons, pour l'atteinte � la vie priv�e que peut constituer l'�laboration de fichiers informatiques. Or peu de chercheurs --ou de journalistes-- ont r�alis� des travaux s�rieux en cette mati�re au Qu�bec.
Une autre piste pour agir
Alors, comment nos jeunes se d�fendront-ils du Bonheur publicitaire qui les corrompt? En prenant eux-m�mes leurs affaires en main. En apprenant, comme on apprend � lire et � �crire, � d�masquer les strat�gies persuasives cach�es sous les apparences anodines de la beaut� ou de l'originalit ( ... ) Certains jeunes se sont rassembl�s pour se d�fendre contre les miroitements de la culture de masse et les assauts de la publicit�. Par exemple, un groupe de jeunes de l'Ouest ont form� la Media Foundation (1243 West 7th Ave. Vancouver BC V6H 1B7 1-800-663-1243) qui publie un excellent trimestriel, Adbusters. Dans Adbusters, on trouve plein d'articles critiques sur notre soci�t� de masse et surtout, on y propose des outils pour sensibiliser les jeunes � ce qu'est la manipulation m�diatique et des outils pour les aider dans leurs actions:
vid�ocassettes, posters, annonces t�l�vision, etc. Adbusters suscite la cr�ativit� anti-publicitaire chez ses lecteurs.
Parfois, cette contrepublicit� cr��e par les jeunes manque de go�t (sans jeu de mots!). Mais ce dont je suis s�r, c'est qu'elle suscite et suscitera dans l'avenir un int�r�t de plus en plus grand pour un mouvement de d�fense contre l'envahissement massm�diatique et publicitaire. Et je m'engage � les aider. Suis-je en train de cracher sur le pain qui m'a nourri? Il faut bien recracher la nourriture qui est poison.
Oui, je pense que les publicitaires s'acharnent � coincer nos jeunes par des promesses de Bonheur factice. Il appartient d�sormais � nos jeunes -- pour la coincer-- de mettre au jour les mirages de la publicit�. Ou � tourner le bouton de leur appareil.