10 novembre 1994 |
Congr�s de g�rontologie
Vieillir, c'est encore vivre
Au tournant de l'an 2000, le contexte nouveau dans laquelle baigne la soci�t� ne semble pas favorable � la vieillesse, parce qu'il ne semble pas favoriser l'�panouissement de la condition humaine en tant que telle, et dont la vieillesse est essentiellement partie int�grante. C'est ce qu'a affirm� Jacques Laforest, professeur � l'�cole de service social, � l'occasion du congr�s de g�rontologie qui s'est tenu � l'Universit�, les 3 et 4 novembre, sous le th�me ��mergences de nouvelles vieillesses- Enjeux de l'an 2000�.
�Passer d'un �ge de l'humanit� � un autre repr�sente une exp�rience de changement beaucoup plus intense que de passer d'un si�cle � l'autre ou m�me d'un mill�naire � l'autre. C'est peut-�tre ce que nous vivons aujourd'hui�, estime Jacques Laforest. Bien qu'il soit �vident qu'�tre vieux aujourd'hui n'est pas la m�me chose que d'avoir �t� vieux au si�cle dernier, la vieillesse a toujours exist�; par cons�quent, sa r�alit� pose les m�mes questions aux hommes et aux femmes de tous les si�cles, dont la suivante, capitale: quelle valeur et quelle signification ma vieillesse peut-elle avoir en termes de vie?
Dans cette �qu�te de sens�, les vieillards ont � surmonter un double obstacle, explique Jacques Laforest: d'une part, la proximit� de la mort, et d'autre part, la perspective de la d�cr�pitude de leurs conditions de vie. Pour venir � bout de ces difficult�s, la personne doit accomplir trois t�ches: maintenir un sentiment d'appartenance envers la soci�t�, conserver ou reb�tir un niveau �lev� d'estime de soi et solutionner sa propre mort. Dans le premier cas, les politiques �conomiques actuelles visant � r�duire le d�ficit pourraient bien porter atteinte au sentiment d'appartenance des personnes �g�es -qui constituent une client�le vuln�rable pour les politiciens- en leur enlevant les moyens financiers indispendables de participer activement � la vie de la soci�t�.
En second lieu, �la soci�t� domin�e par l'�thique fonctionnaliste� a tendance � valoriser les personnes en termes d'agir et d'avoir, plut�t qu'en termes d'�tre, univers dans lequel le vieillard a du mal � inscrire son identit�. Finalement, constate Jacques Laforest, cette m�me soci�t� ne favorise pas la d�couverte d'un sens � la mort, celle-ci �tant devenu un sujet tabou. Conjugu� � la baisse g�n�ralis�e de la croyance religieuse, les personnes �g�es trouvent de moins en moins dans leur environnement socio-culturel des conditions qui pourraient les aider � donner un sens � leur propre mort.
L'imagination au pouvoir
Pour sa part, Andr� Lux, professeur au D�partement de sociologie, a soulev� la l'�pineuse question de la mani�re dont l'�tat qu�b�cois r�pondra � l'augmentation importante des besoins engendr�s par le vieillissement de la population, tout en comprimant ses d�penses. �Quand on sait que le syst�me de sant� et des services sociaux repr�sentait d�j�, en 1991-1992, 31,6% du budget du gouvernement...� Pour bien faire comprendre que �ce ne sera pas une sin�cure de garantir � ces personnes �g�es la s�curit� en pleine explosion d�mographique la s�curit� de leur revenu sous forme de pensions�, le sociologue a fourni des statistiques qui ont de quoi faire r�fl�chir: Au Qu�bec, la classe des personnes de 65 ans et plus est ainsi pass�e de 5% dela population, en 1951, � 11% en 1991, et sera autour de 15% en 2011 et entre 22 et 27% en 2041. Dans le m�me intervalle, les jeunes de moins de 20 ans passent de 40% en 1951 � 27% en 1991 et compteront pour 22 � 23% de la population en 2011 et de 18 � 22% en 2041.
�Il faudra que l'imagination prenne le pouvoir�, croit le sociologue, avant d'ajouter que� plusieurs sp�cialistes affirment qu'il nous reste 20 ans pour nous adapter aux cons�quences du vieillissement de l'�tat�. � son avis, les personnes �g�es du XXIe si�cle poseront tout un d�fi � une soci�t� qui n'aura pas pr�vu � temps comment fonctionner avec une telle proportion de gens �g�es. C'est � voir...
REN�E LAROCHELLE
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