On a eu chaud!
Bilan énergétique troublant de la dernière
vague de froid
"C'était très serré!", calcule
Jean-Thomas Bernard, titulaire de la Chaire en économique
de l'énergie électrique, en faisant le bilan énergétique
de l'épisode de froid intense vécu par le Québec
du 13 au 16 janvier. Hydro-Québec aurait pu manquer de
courant pendant cet épisode polaire marqué par
une demande sans précédent d'électricité
de la part des Québécois. Leur consommation a atteint
en effet des records de 36 274 mégawatts, alors que la
capacité de production d'Hydro-Québec s'établit
à environ 37 000 Mégawatts. "Il n'aurait pas
fallu qu'une panne survienne sur le réseau et qu'on perde
1 000 ou 1 500 mégawatts", remarque Jean-Thomas Bernard.
Selon lui, l'entreprise publique cherche toujours à conserver
10 % de sa production comme coussin de sécurité
pour éviter justement de priver des consommateurs de courant.
Elle a donc demandé aux consommateurs de réduire
leur demande, tout en achetant de l'électricité
aux alumineries d'Alcan, ainsi qu'environ 1 200 mégawatts
du Nouveau-Brunswick, de l' Ontario et sur le marché nord-américain.
Mais, au fait, pourquoi n'avoir pas importé davantage
d'énergie? «Il faut savoir que nos voisins américains
subissaient eux aussi un froid intense, précise l'économiste.
Le système était donc à pleine capacité
en Nouvelle-Angleterre et les lignes à haute tension très
chargées.» Impossible donc dans ces conditions d'acheter
de l'électricité dans les États du Sud car
le trafic intense plus au Nord rendait les connexions impossibles
avec le Québec. De plus, les prix s'envolent en période
de rareté. Si en temps ordinaire un kilowatt peut se vendre
quelque cents, ce même kilowatt se négociait à
plusieurs centaines de dollars sur le marché nord-américain
le 15 janvier. Une perte sèche pour Hydro-Québec
dont les tarifs de consommation demeurent toujours à 6
cents le kilowatt. Selon Jean-Thomas Bernard, cette presque crise
pourrait peut-être donner des arguments de poids à
Hydro-Québec pour convaincre les décideurs d'augmenter
ses capacités de production, inchangées depuis
dix ans. "Depuis deux hivers, la consommation connaît
des pointes jamais égalées", constate-t-il.
PASCALE GUÉRICOLAS
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