
La Nouvelle-France, aller-retour
Un projet en cours sur les lieux de mémoire
est à la base d'une entente France-Québec
À Paris, le 9 septembre dernier, Line Beauchamp, ministre
de la Culture et des Communications du Québec (MCCQ),
a signé, avec son homologue français Jean-Jacques
Aillagon, une entente visant à renforcer la coopération
interministérielle en matière de patrimoine, de
musées et d'archives. Le communiqué émis
par le ministère français mentionne que l'entente
a comme point de départ un projet conjoint, lancé
en 2000 par le MCCQ, le Ministère de la Culture et de
la Communication de France et l'Université Laval.
À Laval, le Centre interuniversitaire d'études
québécoises (CIEQ) agit comme maître d'oeuvre
du projet "Inventaire des lieux de mémoire de la
Nouvelle-France". Ce projet comprend notamment la création
d'une base de données évolutive et disponible sur
Internet, la couverture de 17 régions du Québec
et de quatre départements français correspondant
à la région de Poitou-Charentes, et la production
de plus de 1 200 fiches de lieux de mémoire, dont quelque
350 en Poitou-Charentes. La phase 1 comprend aussi la réalisation
d'un atlas, en format papier et en version électronique,
de même qu'un module cartographique qui viendra compléter
la banque de données.
Une démarche au caractère atlantique
Dans ce projet d'inventaire multinational, les chercheurs
mettent en relation des lieux de mémoire entre eux pour
permettre une compréhension nouvelle de la période
de la Nouvelle-France. Les trois catégories d'objets inventoriés
visent à reconstituer la totalité des traces de
l'expérience coloniale française en Amérique
du Nord. Ces traces sont architecturales (ex.: le manoir Mauvide-Genest
à l'Île d'Orléans) et archéologiques,
elles portent sur l'aménagement de l'espace (ex.: des
segments du chemin du Roy) et elles prennent la forme de repères
commémoratifs (ex.: la croix de Gaspé).
"Nous voulions interroger le phénomène "Nouvelle-France"
au Québec et en France à travers les traces qui
restent dans le paysage, explique Marc St-Hilaire, professeur
au Département de géographie, directeur du Laboratoire
de géographie historique et chercheur responsable du projet
au CIEQ. L'"Inventaire" a une portée beaucoup
plus riche parce qu'on fait l'exercice des deux côtés
de l'Atlantique, et l'on met en relation ce qui reste de la Nouvelle-France,
tant ici qu'en France. Cette dimension novatrice nous révèle
des choses intéressantes, notamment sur les liens de commerce.
Par exemple, nous avons des recherches archéologiques
en cours sur la présence d'une goudronnerie construite
sous Jean Talon à Baie-Saint-Paul et qui desservait les
chantiers maritimes de Rochefort, en France."
La région de Poitou-Charentes a joué jadis un rôle
central dans les rapports démographiques, économiques
et administratifs entre la France et sa colonie. Comme le souligne
Marc St-Hilaire, environ 20 % des immigrants pionniers de Nouvelle-France
provenaient de cette région.
Dans l'entente du 9 septembre, les signataires expriment la volonté
de soutenir l'expansion du projet d'inventaire à l'ensemble
de la France et de l'Amérique du Nord. Le CIEQ, lui, est
déjà à constituer le réseau universitaire
qui lui permettra d'étendre son action hors Québec
et en dehors de la région de Poitou-Charentes.
YVON LAROSE
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