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4 avril 2002 ![]() |
La réforme des programmes scolaires au Québec, un recueil de textes rassemblés par Diane Saint-Jacques et Clermont Gauthier et publié aux Presses de l'Université Laval, constitue les actes d'un colloque de l'Association canadienne-française pour l'avancement des sciences, tenu à l'Université de Montréal au printemps 2001. Une quinzaine de chercheurs s'y interrogent sur la nature et l'évolution de la réforme de l'enseignement proposée en 1997 par le parti Québécois, en situant celle-ci à travers la conception provinciale de l'école depuis un siècle et demi. On le sait, la Révolution tranquille a entraîné des réformes éducationnelles qui, malgré leur nécessité, ont été la cause d'excès dont nous ressentons encore les effets. Dans l'avant-propos de l'ouvrage, on peut lire que "La réforme en cours semble [elle] aussi utiliser une rhétorique de rupture, du moins dans ses intentions de recentrer l'école sur la mission d'instruction, plutôt que de croissance personnelle." Pourtant, certains accusent déjà cette nouvelle réforme de reproduire l'esprit technocratique actuel, en s'écartant peu à peu de ses principes de départ. Selon les auteurs, les délais relativement longs qu'impose la réforme nécessitent que l'on suive de façon critique les différentes étapes de celle-ci, afin de ne pas perdre de vue les propositions initiales.
De la tranquillité à la révolution
Une grande qualité de ce livre est qu'il commence par
une synthèse des différents programmes qui ont jalonné
l'éducation québécoise depuis la moitié
du XIXe siècle. On peut ainsi voir comment les années
soixante-dix ont joué un rôle de pivot entre une
période conservatrice et la période de constant
réaménagement qui a cours depuis vingt ans. Dans
l'introduction signée Stéphane Martineau et Clermont
Gauthier ("Évolution des programmes scolaires au Québec:
un aperçu pour mieux comprendre la réforme actuelle"),
on soutient d'ailleurs que les récentes réformes
tendent au fond à prolonger le mouvement institué
en 1981.
Cette continuité est assez fréquemment relevée
dans les 15 études qui forment l'ouvrage. Alors que, dans
la première partie, les auteurs analysent la problématique
et les contenus du nouveau "Programme des programmes"
en essayant d'en dégager les innovations, ils ciblent,
dans la deuxième partie, des secteurs précis, dans
une perspective d'abord historique. Ainsi, Louise Poirier observe
l'évolution du programme de mathématiques à
partir de 1873, alors que Denis Simard et Zara Pier-Vaillancourt
portent leur regard sur les nouveaux programmes d'art au primaire.
Le français, bien évidemment, les sciences humaines
et l'éducation physique font aussi l'objet d'une analyse
approfondie.
Vers une généralisation du concept de culture?
Enfin, cette réflexion collective dans le domaine des
sciences de l'éducation se termine par une critique autour
du thème de la culture. Parmi les objectifs de la réforme,
on trouve en effet celui de valoriser non seulement les "connaissances"
mais avant tout les "compétences" transversales
que les élèves acquerront durant leur cheminement.
Toutefois, bien que les politiques valorisent constamment la notion
de culture, il semble que cette dimension relève beaucoup
de l'initiative personnelle de l'enseignant. Or, nous disent Diane
Saint-Jacques et Adèle Chené, "L'écart
entre l'intention de rehaussement culturel et ses premières
formulations concrètes dans le programme et le document
de référence sur la dimension culturelle se traduit
essentiellement par une réduction de la portée de
la visée culturelle, manifestée par l'extension
du concept de culture, la diversification des finalités
et la généralité des pistes d'action."
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