19 octobre 2000 |
Comment les différents modes de communication familiale
influencent-ils la tendance naturelle de l'adolescent à
se procurer de nouveaux biens? Quelle influence ces modes de communication
ont-ils sur les stratégies de persuasion mises de l'avant
par ce même adolescent en de telles circonstances? Ces questions
et bien d'autres ont fait l'objet de la thèse de doctorat
de Pierre Balloffet, ancien étudiant de l'Université
Laval, aujourd'hui professeur adjoint au Service de l'enseignement
du marketing à l'École des hautes études
commerciales de Montréal.
Le vendredi 6 octobre, Pierre Balloffet était dans nos
murs pour sa soutenance de thèse. Celle-ci avait pour titre:
L'influence des modes de socialisation dans la famille sur
l'innovativité des adolescents et leurs stratégies
d'acquisition de nouveaux produits: une application au domaine
de la mode vestimentaire.
Quatre stratégies d'influence
La recherche de Pierre Balloffet a porté sur 380 adolescents
de la région de Sherbrooke âgés entre 11 et
18 ans. Les filles (221) étaient majoritaires, de même
que les familles biparentales (291). Un des aspects étudiés
a été l'"innovativité" chez l'adolescent,
soit la tendance à innover, à accepter la nouveauté.
La structure de communication familiale retenue pouvait prendre
quatre formes: consensuel, protecteur, pluraliste ou laisser-faire.
Les stratégies d'influence de l'adolescent ont constitué un des éléments clés de la grille d'analyse. Ces stratégies sont au nombre de quatre: demande, marchandage, persuasion et recours aux émotions. Dans l'étude, les sujets ont eu tendance à privilégier ces stratégies par ordre décroissant. "Je leur dis que je veux ce vêtement tout simplement", "J'offre de payer au moins en partie le vêtement", "Je dis à mes parents que mes amis portent ce vêtement" et "Je me tais et je refuse de parler jusqu'à ce que mes parents acceptent de m'acheter ce vêtement" sont respectivement des exemples de chacune de ces stratégies.
Socialisation et "innovativité"
Cette recherche visait à mieux comprendre certains
aspects de la prise de décisions économiques dans
la famille, lieu privilégié de socialisation à
la consommation. Les résultats obtenus tendent à
démontrer qu'il existe effectivement un lien entre, d'une
part, les différents modes de socialisation des adolescents
et, d'autre part, leur "innovativité" et les
stratégies d'influence qu'ils privilégient. Au départ,
l'"innovativité" et les stratégies découlent
de l'intérêt des adolescents pour la classe de produits
convoités, et du leadership d'opinion qu'ils manifestent
en la matière. L'influence la plus grande qu'ils subissent
provient des médias d'information et des jeunes de leur
âge. Le trait d'"innovativité" des adolescents,
de même que leur choix de stratégies d'influence
sont teintés par la forme de communication qui existe entre
eux et leurs parents.
En conclusion de sa thèse, Pierre Balloffet indique
que sa recherche a permis de mieux comprendre certaines dynamiques
de décision familiales. Toutefois, les résultats
et analyses présentent une utilité assez limitée
pour un gestionnaire ou un responsable de commercialisation. Selon
lui, la recherche a peu tenu compte des effets dynamiques des
interactions familiales. C'est que de nombreux instruments de
mesure, destinés à l'enfant ou à l'adolescent,
manquent de fiabilité et offrent une validité discutable.
D'autre part, les résultats obtenus ouvrent la porte à de nouvelles pistes de recherche. La "reconstruction" de certains processus de décision familiale relatifs à l'acquisition d'un produit en serait une. La contribution de l'adolescent, dans ce cadre, pourrait prendre la forme d'un récit écrit. Ce récit décrirait les stratégies d'influence qu'il privilégie, de même que les obstacles, alliances ou moyens qu'il entrevoit pour atteindre son but.
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