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28 octobre 1999 ![]() |
Il existe encore au Québec, en 1999, des médecins qui font des consultations médicales au domicile de leurs patients. En fait, ils sont beaucoup plus nombreux qu'on pourrait le soupçonner à maintenir cette tradition vivante, en particulier dans la région de Québec, révèle une étude menée par des chercheurs de la Faculté de médecine auprès de quelque 500 médecins. Parmi ceux qui ont déclaré faire, à l'occasion ou fréquemment, des consultations à la maison, 58 % font plus de cinq visites par semaine et 68 % y consacrent plus de trois heures. "La plupart des médecins font des visites à la maison, mais à petit débit, précise l'une des auteurs de l'étude, Michèle Aubin. Ils le font essentiellement par fidélité envers leurs clients qui ne peuvent plus se déplacer."
Dans un récent numéro de la revue Canadian Medical Association Journal, Rénald Bergeron, Andrée Laberge, Lucie Vézina et Michèle Aubin dressent un portrait de ces médecins et de leurs motivations. Ils ont, en moyenne, 45 ans, ils pratiquent la médecine depuis 20 ans et ils effectuent des visites à domicile depuis 17 ans. "Ils sont un peu plus âgés et expérimentés que les médecins qui ne font pas de visites à domicile, souligne Michèle Aubin. En fait, ils vieillissent avec leur clientèle."
Des malades chroniques en majorité
Au cours de la dernière année, ils ont soigné
28 patients à leur domicile. En général,
ils consacrent un peu plus de cinq heures par semaine à
ces visites. La plupart de ces médecins sont de sexe masculin
(72 %); les hommes effectuent 12,8 visites hebdomadairement contre
8,3 pour les femmes. Environ 70 % des patients visités
souffrent de maladies chroniques. La majorité de visites
ont donc pour but de suivre l'évolution de l'état
de santé des malades. On est donc loin de la médecine
d'urgence à la maison.
Près de 73 % des médecins qui travaillent en clinique privée font des visites à domicile contre 67 % des médecins d'unités de médecine familiale et 44 % des médecins de CLSC. La majorité des médecins (65 %) sont payés à l'acte pour les visites qu'ils font à la maison. Les médecins en pratique privée font deux fois plus de visites (12 par semaine) que leurs collègues des unités de médecine familiale ou des CLSC, sans toutefois y investir plus de temps. "Ceci pourrait s'expliquer par le fait que les médecins des unités de médecine familiale et des CLSC héritent des cas lourds qui exigent plus de soins", avance Michèle Aubin.
Des besoins en croissance
Selon Michèle Aubin, les besoins pour des soins médicaux
à domicile sont encore plus grands aujourd'hui qu'au moment
où l'étude a été réalisée
en 1995. "En raison du vieillissement de la population et
des changements survenus dans le système de santé,
le nombre de patients qui nécessitent des soins à
la maison va en augmentant. Il va falloir trouver une façon
de répondre à ce besoin."
Selon elle, il ne s'agit pas de confier la responsabilité des visites à domicile à des médecins qui en feraient leur principale activité. "Ce serait aller à l'encontre de ce qui se passe présentement sur le terrain. Il y a déjà beaucoup de médecins qui font des visites et mieux vaut les encourager à continuer en éliminant les irritants." Parmi ces irritants se trouve le problème de la rémunération. Les médecins reçoivent un peu plus d'argent pour une visite à domicile qu'une consultation en cabinet mais ils doivent remplir d'agaçants formulaires pour justifier la perte d'autonomie de leurs patients. Pour des cas lourds, il faudrait penser à une rémunération horaire plutôt qu'à l'acte, ajoute-t-elle.
Chose certaine, il faudrait examiner soigneusement comment l'organisation de la pratique médicale pourrait être adaptée pour satisfaire les besoins de soins à domicile, parce que cette demande va continuer à croître, prédit Michèle Aubin.