25 mars 1999 |
Avoir la responsabilité de deux enfants ou plus et occuper un emploi stressant provoque une hausse persistante de la pression sanguine chez les femmes, conclut une étude menée par une équipe de chercheurs des facultés de Médecine et de Pharmacie. Cette relation peut sembler évidente mais elle ne se manifeste pourtant que chez les femmes détenant un diplôme universitaire. En effet, la pression sanguine des femmes moins scolarisées n'est pas affectée aussi nettement par ces sources de stress alors que, chez les hommes, la pression sanguine redescend après les heures de travail.
"La hausse de la pression sanguine chez les diplômées universitaires semble résulter de l'exposition combinée du stress au travail et des responsabilités familiales, explique Chantal Brisson, du Département de médecine sociale et préventive. L'augmentation de la pression sanguine se manifeste pendant les heures de bureau mais aussi le soir et la nuit." La chercheure et ses collègues Nathalie Laflamme, Jocelyne Moisan, Alain Milot, Benoît Mâsse et Michel Vézina ont évalué le stress au travail, en mesurant la demande psychologique (travailler fort, contraintes de temps, concentration intense, demandes contradictoires, etc.) et la latitude décisionnelle qui caractérisaient les postes des participantes. Ils ont également estimé leurs responsabilités familiales en considérant le nombre d'enfants, leur âge ainsi que la proportion des tâches ménagères qu'elles effectuaient. Leur pression sanguine a été mesurée en continue à l'aide d'un appareil portatif installé sur chaque participante pendant une période de 24 heures. L'appareil enregistrait les données à toutes les 15 minutes pendant la journée et à toutes les 30 minutes pendant la nuit. Les 199 femmes, dont 69 diplômées universitaires, qui ont collaboré au projet occupaient des postes de col blanc (secrétaires, commis de bureau, techniciennes, professionnelles, cadres intermédiaires ou supérieures) dans des entreprises de la ville de Québec.
Les résultats de l'étude, publiés dans le numéro de mars de la revue scientifique Psychosomatic Medicine, indiquent que, chez les diplômées universitaires, la pression sanguine est de 6 points plus élevée (122 mm) lorsqu'elles ont des responsabilités parentales élevées. Cette hausse se manifeste uniquement chez les mères de deux enfants ou plus. Par ailleurs, la proportion des tâches domestiques effectuées par la femme n'a aucun effet sur la pression sanguine. Toujours chez les diplômées universitaires, le fait d'occuper un emploi stressant est associé à une pression sanguine de 6 points plus élevée (123 mm). Ce résultat corrobore les conclusions d'une étude publiée il y a quelques mois à peine par le même groupe de chercheurs.
La combinaison du travail stressant et des responsabilités familiales élevées provoque une augmentation de 11 points (127 mm) de la pression sanguine. Une différence persistante de cet ordre peut avoir des répercussions sur la santé, signalent les chercheurs. En effet, une augmentation de 5 unités de la pression sanguine accroît les risques de crise cardiaque de 34 % et les risques de maladies coronariennes de 21 %.
Enfin, les données indiquent que le niveau de stress au bureau et la charge de responsabilités familiales n'ont aucun effet sur la pression sanguine des femmes qui n'ont pas de diplôme universitaire. Selon les chercheurs, il se pourrait que les femmes diplômées qui occupent un poste stressant et qui ont des charges familiales élevées vivent davantage de conflits entre leur travail et leur famille, augmentant ainsi leur vulnérabilité à ces sources de stress.