![]() |
28 novembre 1996 ![]() |
RECHERCHE
Un entraînement par électrostimulation rend les muscles de sédentaires aussi endurants que ceux de personnes physiquement actives!
Des chercheurs du Département d'éducation physique viennent de démontrer qu'il est possible d'accroître la résistance des muscles à la fatigue grâce à l'électrostimulation. L'efficacité de "l'entraînement" par électrostimulation est telle qu'au terme d'un programme de six semaines, l'endurance musculaire de sujets sédentaires augmente au point de rejoindre celle de personnes pratiquant régulièrement des activités physiques. Les chercheurs Rémy Thériault, Marcel Boulay, Germain Thériault et Jean-Aimé Simoneau rapportent ces surprenants résultats dans le dernier numéro de l'European Journal of Applied Physiology .
Les 20 sujets qui ont participé à cette étude devaient se soumettre, pendant six semaines, à des séances au cours desquelles leurs muscles extenseurs du genou étaient stimulés par des impulsions électriques générées par un petit appareil de la grosseur d'un baladeur. À l'aide d'électrodes collées sur la peau, ce générateur transmettait de faibles décharges électriques provoquant des contractions spontanées des muscles visés, au rythme de 8 contractions à la seconde. Le programme d'entraînement comportait deux séances de 90 minutes par jour, six jours par semaine. "Ce protocole reproduit des séances d'activité physique d'endurance, explique Jean-Aimé Simoneau. Les décharges provoquent une sensation de picotement ou de faibles vibrations mais elles ne causent pas de fatigue chez les sujets."
Au terme des six semaines, les chercheurs ont évalué la capacité de travail des muscles extenseurs du genou de chaque sujet et l'ont comparée à ce qu'elle était avant le début du programme. Les mesures ont été effectuées à l'aide d'un appareil enregistrant la force produite par ces muscles lors d'une série de 25 contractions volontaires de dix secondes, séparées par des périodes de repos de cinq secondes. Pour fins de comparaison, les chercheurs ont effectué les mêmes mesures chez 10 personnes pratiquant régulièrement des activités physiques et chez 5 cyclistes de compétition.
L'électrostimulation augmente de 10 % la résistance à la fatigue des sujets sédentaires, si bien que leur performance atteint celle des personnes qui pratiquent régulièrement des activités physiques. Ceux qui rêvent de transformer la Baie James en pépinière d'athlètes seront cependant déçus puisque l'électrostimulation ne provoque aucun changement dans la capacité cardio-vasculaire générale des sujets (il pourrait cependant y avoir une amélioration locale dans les muscles stimulés), ni dans la masse ou la puissance des muscles. Les cyclistes évalués ont d'ailleurs démontré une résistance musculaire à la fatigue beaucoup plus élevée que les sujets électrostimulés.
Les chercheurs expliquent l'augmentation de la résistance à la fatigue par des adaptations physiologiques des muscles. Ils ont noté une hausse de l'activité d'une enzyme, la citrate synthase, reflétant une augmentation de la capacité des muscles à produire de l'énergie, de même qu'un accroissement du pourcentage de fibres musculaires à contraction rapide (type IIa), plus efficaces sur le plan métabolique. "Ces deux éléments démontrent que, sur le plan physiologique, le muscle s'est adapté en fonction d'une plus grande endurance", résume Jean-Aimé Simoneau.
Les résultats de cette étude suggèrent un nouveau mode d'utilisation de l'électrostimulation en réadaptation, estime le chercheur. Présentement, les spécialistes ont surtout recours aux impulsions électriques à haute fréquence (50 impulsions/seconde), qui simulent un travail en puissance du muscle, pour maintenir le tonus musculaire des patients immobilisés à la suite d'un accident ou d'une chirurgie. "Les basses fréquences présentent l'avantage d'être plus facilement applicables et de provoquer une adaptation fonctionnelle du muscle, dit-il, ce qui permet de conserver une activité musculaire de base. L'effet provoqué par l'électrostimulation à basses fréquences permet de compenser les pertes habituellement observées à la suite de l'immobilisation d'un patient."