Les profs, une espèce en mutation?
Les profs: une espèce en mutation?
«Allons-nous, comme professeurs et professeures, pouvoir échapper
à la logique du marché?»
«Devant la perte d'un monopole qui glisse inéluctablement
vers l'apprenant, que faudra-t-il déconstruire?» «En quoi
sommes-nous irremplaçables?»
Pour Thérèse Laferrière, professeure au Département
de didactique, de psychopédagogie et de technologie éducative
de la Faculté des sciences de l'éducation, l'heure était
aux questions fondamentales, le vendredi 23 février. Conférencière
au colloque annuel du Groupe professoral pour l'étude de la pédagogie
appliquée (GEPÉPA), qui se tenait à la salle multimédia
du pavillon Alphonse-Desjardins, l'ex-doyenne de la FSE y a brossé
un tableau ­p; qu'elle a qualifié de réaliste ­p; d'un
monde de l'éducation qui doit composer de plus en plus avec les nouvelles
technologies... et les conséquences qu'elles entraînent pour
le corps enseignant.
Un pouvoir qui change de mains
Son diagnostic, porté sous le thème «L'enseignement,
une fonction universitaire en mutation?», a été on ne
peut plus clair: dans une société fondée sur le savoir,
qui vit à l'heure de l'explosion des connaissances, l'éducation
est maintenant vue comme une entreprise à but lucratif proposant
des produits éducatifs, au sein de laquelle le pouvoir est plus que
jamais entre les mains de l'apprenant.
Les moyens technologiques (ordinateurs, logiciels, bases de données
et autres) introduisent donc une féroce compétition en ce
qui a trait aux multiples sources où l'apprenant peut désormais
aller puiser informations et connaissances. C'est dire que l'autonomie du
professeur est mise au défi, a-t-elle signalé.
S'investir autrement
L'effritement du monopole professoral n'est pas irrémédiable
pour autant, pense Thérèse Laferrière, qui y va de
pistes de réponses. Un premier geste à poser serait de spécialiser
la fonction d'enseignement. Il ne serait plus uniquement question ici de
pédagogie, de prestation en classe pour tous les professeurs, mais
d'autres tâches pour ceux ou celles qui préféreraient
plutôt, entre autres, la planification, l'évaluation, l'accompagnement,
le mentorat.
Il importerait aussi d'investir dans l'établissement de bases de
connaissances en équipes et en réseaux, dans des modules de
cours multimédias avec évaluation intégrée,
autant de productions pédagogiques sur lesquelles il serait même
possible de coller un jour l'étiquette «exportables».
L'acte d'apprentissage se définissant fondamentalement comme un rapport
entre un apprenant et des objets de connaissances, il est essentiel, selon
Thérèse Laferrière, d'effectuer un recadrage de la
situation au premier cycle universitaire pour que l'attention se porte davantage
sur l'apprenant que sur l'enseignant. Enfin de compte, comme c'est le cas
aux cycles supérieurs, pour que les apprenants se retrouvent d'abord
entre eux.
GABRIEL CÔTÉ
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