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24 novembre 1994 ![]() |
ACTUALIT�
Le d�clin de l'empire am�ricain?
Si leur pr�sident actuel, Bill Clinton, est un fervent d�mocrate qui r�ve d'instaurer un syst�me m�dical pour tous, les Am�ricains viennent cependant d'�lire une Chambre des repr�sentants et un S�nat r�publicains, aux tendances coercitives. Irrationalit� ? D�cadence plut�t, a fait valoir Louis Balthazar, professeur au D�partement de sciences politique, lors de sa conf�rence intitul�e "D�mocratie et capitalisme : le dilemme�, pr�sent�e le 21 novembre au Mus�e de la Civilisation.
�Les Am�ricains sont anim�s par deux tendances. L'une, lib�rale, inspir�e par Thomas Jefferson, l'instigateur de la D�claration d'ind�pendance, et l'autre, esentiellement capitaliste, fond�e sur la pens�e d'Alexander Hamilton, � la base de la Constitution des �tats- Unis�, pr�cise cet expert du syst�me politique am�ricain. La D�claration d'ind�pendance reconnait tous les hommes �gaux (les femmes et les esclaves y �tant cependant exclus) et leur accorde des droits fondamentaux � la vie, au bonheur et � la libert�. La Constitution, par ailleurs, bas�e sur une peur de l'anarchie et un besoin d'ordre, pr�ne un gouvernement fort, dot� de pouvoirs forts et d'une banque centrale. Un capitalisme essentiellement orient� en fonction de l'�conomie s'impose donc devant un lib�ralisme tol�rant.
Une tendance lourde?
�M�me s'il y a toujours eu une alternance des d�mocrates et des r�publicains au pouvoir, ces derniers ont continuellement progress� dans le coeur des am�ricains. Il faut �videmment mettre cela en lien avec une �conomie boiteuse. Il est plus facile de parler de redistribution des richesses quand les coffres sont pleins plut�t que quand ils sont vides�, ajoute Louis Balthazar. Pourtant l'�conomie am�ricaine reprend du poil de la b�te depuis un an ou deux. Mais le consommateur moyen n'en ressent pas les effets, et ce sont les riches qui continuent de s'enrichir.
Malgr� cette injustice, les citoyens n'h�sitent pas � voter pour des gouvernements qui travaillent pour l'�lite. Louis Balthazar rappelle d'ailleurs le sondage r�alis� avant l'�lection de Ronald Reagan. � la question: � Reagan gouverne-t-il- pour les riches ?�, la majorit� des sond�s avait opt� pour le oui. � celle � Allez-vous voter pour lui ?�, la majorit� avait encore r�pondu par l'affirmative et ce, m�me si elle n'�tait pas ais�e financi�rement. �Il faut voir l� le r�ve am�ricain:
chaque citoyen esp�re qu'un jour ce sera son tour. Ils sont anim�s par la croyance protestante qui veut que les gens riches soient b�nis des dieux. Les pauvres sont soup�onn�s d'�tre tar�s parce qu'ils ne r�ussissent pas�, constate Louis Balthazar. Incertains, les am�ricains aiment l'alternance; un pr�sident d�mocrate, un r�publicain et ainsi de suite.
Mais pourquoi ce m�lange douteux d'une t�te dirigeante d�mocrate soudain entour�e de r�publicains ? �Il y a eu une lente descente aux enfers, explique Louis Balthazar. Tout d'abord, l'�chec retentissant du Vietnam. Puis, la d�mission de Nixon, un pr�sident corrompu. La constatation que les Japonais, an�antis lors de la Deuxi�me Guerre mondiale, sont maintenant leurs bailleurs de fonds. Les Am�ricains ne savent plus �pargner mais seulement consommer. Quand Clinton s'est mis � parler de projets tels que l'assurance maladie pour tous, cela a �t� la goutte qui a fait d�border le vase.�
Un d�clin militaire et �conomique qui s'accompagne d'une augmentation de la criminalit�, d'une x�nophobie, d'une peur de l'anarchie et donc d'un conservatisme accru. �M�me si le mouvement conservateur a pris des proportions sans pr�c�dent aux �tats-Unis, j'aime croire qu'il existe encore une possibilit� de sursaut. Rappelons -nous que les Am�ricains n'ont pas h�sit� � faire d�missionner deux de leurs pr�sidents. Ils ont le go�t de la justice mais aussi celui des droits et d'une philosophie plus lib�rale�, conclut Louis Balthazar.
VAL�RIE REUILLARD