Hakim Herbane
«Trop souvent, les réalisations architecturales du Nord viennent du Sud sans prendre en compte les besoins locaux, remarque l'étudiant au troisième cycle. Or, il faut offrir aux résidents de ces régions des solutions écologiques et durables.»
Cette volonté des étudiants des écoles d'architecture de l'Université Laval, de l'Université Laurentienne, de l'UQAM et de l'Université McGill, de coller aux réalités locales transparaissait dans les discussions menées tout long du colloque. Plusieurs des présentations ont mis l'accent sur les savoir-faire autochtones et les innovations pour mieux s'adapter aux caractéristiques nordiques. Des représentants d'organismes comme l'Office municipal d'habitation Kativik, le Conseil des Innus de Pessamit, l'Association des étudiants autochtones de l'Université Laval, sans oublier les cabinets d'architectes ont aussi pu témoigner des contraintes que pose l'habitat dans cette région. Les logements manquent encore cruellement, et leur construction pose de grands problèmes environnementaux et d'acceptation sociale.
Les modèles d'habitat importés du Sud dominent dans les villages du Nunavik, puisque la plupart des constructions arrivent en modèles préfabriqués par bateau, à la fonte des glaces. Curieux de mieux comprendre comment les Inuits inventent leur propre habitation quand ils en ont le loisir, Pierre-Olivier Demeule a observé les cabanes temporaires que les chasseurs et les pêcheurs de Salluit construisent au bord du Fjord.
Pierre-Olivier Demeule
«Ils utilisent beaucoup de matériel usagé qu'ils trouvent à la décharge municipale, explique l'étudiant à la maîtrise. Chaque élément répond à une fonction particulière, qu'il s'agisse de l'espace à l'avant pour cuire la viande ou la faire sécher, ou celui à l'arrière pour se reposer.»
«Habiter ces cabanes une ou plusieurs semaines par an, c'est un peu le Club Med des autochtones, illustre Naomi Fontaine. L'auteure innue de Kuessipan et de Manikanetish, étudiante en études littéraires, souligne l'importance de cet habitat pour garder vivant le mode de vie des Premières Nations dans la nature. Mieux comprendre leur construction et leurs caractéristiques particulières contribue aussi à guider les architectes quand il s'agit de réfléchir à un habitat adapté aux besoins de ceux et de celles qui y résident.
Les besoins peuvent d'ailleurs différer selon le type de personnes installées dans ces logements. Si, au fil des millénaires, les Inuits se sont acclimatés aux variations importantes de lumière dans ces contrées proches du cercle polaire, les personnes qui viennent du Sud pour y travailler temporairement font face, elles, à une réalité bien différente. Parvenir à dormir l'été durant les nuits où le soleil se couche seulement quelques heures peut s'avérer un véritable cauchemar. Voilà pourquoi Mojtaba Parsaee a réfléchi à une façon d'ouvrir ou de fermer les façades des bâtiments selon les besoins des résidents en matière de lumière naturelle. Un sujet qui coulait de source pour cet étudiant au doctorat en architecture d'origine iranienne qui a eu bien du mal à s'adapter aux longs hivers québécois…