Brésilienne établie à Québec depuis 2012, Claudia Funchal n'a rien du parcours typique d'un clown, si parcours typique il y a. Ingénieure chimique de formation, elle a découvert les joies du jeu dans un groupe de recherche à l'université d'État de Campinas. «Le théâtre a toujours fait partie de ma vie. Depuis l'âge de 7 ans, je jouais dans des pièces. Issue d'une famille de scientifiques et de mathématiciens, je ne voyais pas cet art comme une profession, mais, à un certain moment, j'ai décidé de quitter mon emploi et de tout recommencer. J'ai fait un deuxième baccalauréat, cette fois sur le métier d'acteur», raconte-t-elle.
Rapidement, l'étudiante s'est initiée à l'art clownesque. «Au début, ce qui m'intéressait dans le langage du clown, c'est la possibilité de créer une relation directe avec le public. Contrairement au théâtre, il est facile de briser le quatrième mur. Le clown joue avec le moment. En tout temps, il peut sortir de son canevas, de son histoire, pour interagir avec les spectateurs.»
Dans le cadre de sa maîtrise en arts de la scène, Claudia Funchal s'est intéressée aux techniques du clown en lien avec la méthode théâtrale de Constantin Stanislavski. Avec son groupe de recherche, elle a fait des interventions dans des hôpitaux, dans des centres d'hébergement auprès d'enfants malentendants, et dans l'espace public.
Elle venait de terminer ses études quand son conjoint lui a annoncé qu'il avait la possibilité de déménager au Québec pour poursuivre sa carrière. «On ne connaissait rien de cet endroit, de sa culture, du climat hivernal. Pour me convaincre, mon mari m'a dit que la ville de Québec avait une université qui offrait un programme de théâtre. J'ai cherché parmi les professeurs de l'Université Laval pour voir si l'un d'eux avait une affinité quelconque avec mon parcours. C'est ainsi que je suis tombée sur le profil de Liviu Dospinescu. Avec son expertise en théâtre, il était en mesure de comprendre ma démarche en recherche-création. Il était le professeur idéal!»
La thèse de Claudia Funchal porte sur la relation entre l'acteur et le spectateur. Pour cela, elle analyse les rouages d'une fête traditionnelle brésilienne, le boi-bumbá. Cet événement annuel consiste en un spectacle participatif qui mélange danses, chants et défilés. La doctorante étudie de quelles façons certains principes de cette fête peuvent être adaptés dans le milieu du théâtre pour en faire une expérience plus interactive.
En dépit de son horaire chargé d'étudiante et de mère de trois enfants, Claudia Funchal continue de s'impliquer dans le milieu de l'art clownesque. Avec la Communauté de recherche interdisciplinaire sur la vulnérabilité, elle a participé récemment à un atelier de création à l'hôpital Jeffery Hale. Non pas avec les patients, mais avec le personnel médical! «Tout comme les malades, l'équipe soignante n'est pas à l'abri de la vulnérabilité. Les médecins et les infirmiers vivent beaucoup de stress. Ils évoluent dans des contextes parfois déstabilisants avec une charge de travail énorme. L'objectif de l'atelier était de proposer des outils et des exercices basés sur les techniques du clown. Même dans les pires situations, on peut rire!»
L'expérience a été un franc succès. «À la fin, un médecin m'a dit qu'il n'avait jamais entendu autant de rires au travail en une seule journée! Un autre a apprécié cette occasion de rencontre avec ses collègues. Souvent, les médecins sont isolés dans leur bureau où ils reçoivent leurs patients. Les équipes médicales se rencontrent rarement. L'atelier n'a duré que 40 minutes, mais il était très intensif», relate l'étudiante.
Claudia Funchal a aussi animé une rencontre avec des élèves du secondaire, cette fois dans le cadre du programme Antre-Classe du Centre Solidarité Jeunesse. L'activité lui a permis de sensibiliser ces jeunes à des valeurs qui sont au cœur de l'univers clownesque, comme le respect et l'inclusion. «Le clown donne la liberté d'être soi-même. Il peut être maladroit, ce qui n'empêche pas les gens de l'aimer. Certaines caractéristiques, considérées comme des faiblesses dans la vie courante, peuvent devenir une force. Pour les jeunes, cet art permet de transmettre plusieurs messages positifs», conclut la doctorante.